Menaces sur le PER  ?

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Après avoir été interdit aux mineurs depuis début 2024, le plan d’épargne-retraite (PER) individuel le sera-t-il bientôt aux seniors ?

C’est l’une des propositions choc du rapport d’information sur la fiscalité de l’épargne-retraite présenté fin septembre par les députés Félicie Gérard et Charles de Courson. Précisément, les auteurs recommandent d’interdire la souscription d’un PER au-delà de 67 ans et surtout de prévoir un dénouement automatique à 70 ans. Le but ? Eviter des stratégies fiscales liées à la transmission patrimoniale au décès. Pour rappel, concernant le PER assurance, le capital est transmis au(x) bénéficiaire(s) désigné dans le contrat selon une fiscalité proche de l’assurance-vie (pour un décès avant 70 ans, abattement de 152 500 € par bénéficiaire, puis taxation graduelle ; pour un décès post-70 ans, droits de succession selon le lien de parenté entre le défunt et le bénéficiaire, après un abattement de 30 500 €). Aucune reprise de l’avantage fiscal perçu à l’entrée n’est de rigueur. Illustration : en désignant son conjoint comme bénéficiaire, il perçoit le capital-décès sans impôt (puisqu’exonéré de droits en toutes circonstances), et ne rend pas le gain fiscal lié aux versements. « Ce type de produit peut actuellement être utilisé comme un outil d’optimisation de la fiscalité successorale, lit-on dans le rapport. Ce risque est bien identifié par l’administration, les professionnels et les contribuables, sans qu’il soit possible de mesurer avec précision le phénomène… La direction générale du Trésor reconnaît une perte sèche pour le budget de l’Etat, sans être capable d’en évaluer le montant. Il existe donc une niche fiscale liée à la transmission du PER qui ne dit pas son nom. » On ne saurait être plus clair.

La fiscalité, nerf du débat
Le Trésor indique avoir déjà engagé des réflexions pour appliquer un âge limite de liquidation du PER. Une telle mesure serait « un coup terrible porté au PER » selon les mots d’un assureur traditionnel de poids. « Obliger le tenant du PER à récupérer son capital, sur lequel il sera imposé, alors qu’il n’en aura pas forcément l’utilité et devra le replacer à un âge avancé, c’est du défaut de conseil. C’est aussi ôter une partie de l’attrait de ce placement par rapport à une solution concurrente, l’assurance-vie. » Le rapport ne s’arrête pas là, pointant les inégalités fiscales entre ménages. Les députés veulent ainsi rendre le PER plus attractif pour les familles modestes, proposant d’ajuster les taux de CSG pour les rentes viagères (un élément dérisoire tant la rente est boudée en sortie des produits d’épargne retraite). Et suggérant de rendre obligatoire la mise en place d’un PEReco dans les entreprises de plus de 11 salariés… sans contraindre employeurs et salariés à y verser des contributions. La fiscalité du PER est bien le nerf de la guerre, que les rapporteurs jugent trop « complexe », rappelant que la taxation des prestations varie selon la nature des versements et les modalités de sortie, « ce qui rend le dispositif difficilement compréhensible pour les épargnants ». D’autant que « certains aspects du cadre socio-fiscal du PER, tels que le traitement des prestations correspondant aux garanties complémentaires, doivent encore être précisés par l’administration fiscale ».

Trop d’info tue l’info ?
Dans le détail la nécessité d’adapter la fiscalité de l’assurance-vie afin de rendre le PER plus compétitif est aussi émise. La puissante Fédération des assureurs va-t-elle réagir ? Ce n’est pas tout, ce rapport en rajoute une couche en matière d’informations donnée aux ménages dans le but d’accroître la lisibilité du produit. En pratique sont proposées « la création d’une fiche d’information standardisée pour mieux comprendre les frais, la mise en place de simulateurs en ligne, ainsi que l’organisation de sessions publiques d’éducation financière ». Reste à voir ce qu’il sera fait de ce rapport offensif. « Si tout travail d’évaluation est louable, il ne doit pas aboutir à déstabiliser un produit d’épargne qui par nature a besoin de temps pour faire ses preuves, estime Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’épargne. Les initiateurs du PER souhaitaient faciliter l’accès à l’épargne-retraite et réorienter l’épargne des Français vers des placements longs. Or, pour opérer des changements de comportement, une stabilité des règles est indispensable. »

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