Pionnier de l’usufruit locatif social (ULS), Perl accélère son développement sous l’impulsion d’un management récemment renouvelé. Un partenariat avec CDC Habitat accompagne cette politique ambitieuse.
Rencontre avec Nicolas de Bucy, directeur général adjoint de Perl.
Investissement Conseils : Pouvez-vous nous rappeler en quoi consiste le modèle de Perl ?
Nicolas de Bucy:Perl est l’initiateur du modèle de l’investissement en nue-propriété adossé à de l’usufruit locatif social (ULS). Le droit de propriété est partagé entre un bailleur qui possède l’usage des droits immobiliers et un investisseur qui détient la nue-propriété du bien. La durée convenue de démembrement atteint généralement quinze à dix-sept années. A l’issue de l’opération, le nu-propriétaire récupère automatiquement la pleine propriété du bien.
Pour l’investisseur, ce modèle a de nombreuses vertus:il permet d’acquérir de l’immobilier qualitatif dans des zones tendues, à un prix décoté d’environ 30 à 40 %. Ne percevant pas de revenus, l’investisseur n’est pas fiscalisé, et l’achat en nue-propriété est exonéré d’IFI. Si le contribuable capte par ailleurs des revenus fonciers, il peut déduire les intérêts d’emprunt liés à son achat démembré et créer ainsi du déficit foncier.
Au-delà de ces aspects financiers, l’investissement en nue-propriété présente l’intérêt d’être un investissement responsable, puisqu’il participe à la création de logements abordables, voire sociaux. Une donnée qui compte aujourd’hui dans la tête d’un investisseur.
Quel est votre avantage sur le marché ?
Avec ses vingt-et-une années d’existence, Perl est le seul acteur à avoir piloté le cycle complet de l’usufruit, puisque nous avons déjà débouclé sept programmes, soit près de deux cents logements. Tous les locataires ont été accompagnés avec des solutions à la clef. Au-delà des promesses, nous apportons donc la preuve que nous respectons nos engagements.
L’inquiétude, lors des débouclages, repose sur la capacité du bailleur de pouvoir reloger les locataires à la fin de la conven-tion et sur la potentielle difficulté qu’éprouvent ces derniers à se reloger dans le périmètre de l’opération. Pour qu’un débouclage se passe bien, il faut donc le préparer suffisamment en amont. Cela nécessite l’expertise d’une équipe dédiée pour un accompagnement qui va au-delà de l’encadrement prévu par la loi. Un service que nous sommes aujourd’hui les seuls à offrir:nos spécialistes sont présents à la livraison, mais aussi tous les quatre ans pour un audit technique de l’investissement. Ils sont capables de répondre à toutes les questions, notamment aux problématiques de cession avant le terme du démembrement; nous sommes aujourd’hui les seuls à organiser un marché secondaire.
Enfin, deux ans avant la fin de l’opération, nous nous rapprochons de toutes les parties afin de recueillir leurs intentions concernant l’après-démembrement:le locataire souhaite-t-il déménager, continuer de louer, racheter le logement s’il est mis en vente ? Le propriétaire souhaite-t-il continuer la location, revendre, récupérer le logement ? Nous accompagnons aussi l’usufruitier dans ses travaux de remise à niveau, d’enquête sociale auprès du locataire.
Quel est votre retour d’expérience sur les débouclages ?
Les statistiques de nos précédents débouclages montrent que 50 % des propriétaires mettent le logement en vente; une partie de ces biens est alors achetée directement par les locataires. 43 % des propriétaires continuent la location, soit avec le même, soit avec un nouveau locataire. Enfin, 7 % des biens sont repris par le nu-propriétaire pour une utilisation personnelle. Nous nous préparons à déboucler mille cinq cents logements dans les cinq années à venir, ce qui est susceptible de faire évoluer ces pourcentages. La plupart des débouclages effectués jusqu’à présent concernaient l’Ile-de-France. Peutêtre observerons-nous davantage de reprises sur des opérations de bord de mer… Ce qui est clair, c’est que le dispositif est vertueux, y compris pour l’occupant. En effet, l’obligation faite au bailleur de reloger les habitants ne concerne que les locataires encore sous le plafond social. Or, nous constatons qu’au terme de la période, peu sont concernés, preuve que le dispositif a eu un effet bénéfique sur leur parcours résidentiel. Par ailleurs, même si le locataire dépasse les plafonds sociaux à la fin de la convention, rien n’empêche de continuer à lui louer le logement, ce qui induit, là encore, un parcours résidentiel vertueux. Enfin, quelques locataires acquièrent même le logement qu’ils occupaient.
ULS, ULI, ULL… A quoi correspondent ces acronymes ?
L’usufruit locatif social (ULS) correspond à un démembrement dans lequel le bailleur usufruitier va traiter les logements sous un schéma de logements sociaux. En usufruit locatif intermédiaire (ULI), il va suivre un schéma de logements intermédiaires. Enfin, l’usufruit locatif libre (ULL) correspond au marché libre. Certains bailleurs privilégient cette dernière formule pour « tirer »les loyers. Elle est plus rare, mais se rencontre notamment dans l’existant, lorsque la collectivité veut garantir le maintien des locataires en place.
En mobilisant l’épargne privée, ces formules s’inscrivent en complément du logement social, intermédiaire et abordable dit pérenne, et permettent d’équilibrer des opérations là où les schémas classiques échouent ou nécessitent un renfort de subventions publiques qui pourraient être utilisées plus efficacement ailleurs.
Quel est l’objectif du partenariat que vous venez de signer avec CDC Habitat ?
CDC Habitat est un opérateur global de l’habitat d’intérêt public avec lequel nous avions déjà travaillé. Ce partenariat entend développer l’offre de logements sociaux, intermédiaires et abordables dans les zones tendues, avec l’objectif de produire mille logements en usufruit locatif, à horizon trois ans. L’idée est de diversifier les modes d’intervention pour produire davantage de logements dans un contexte où tous les outils doivent être utilisés pour relancer la production.
En combinant nos savoir-faire, nous irons chercher des modalités innovantes et sécurisantes pour accompagner encore plus fortement les fins d’usufruit, par exemple par le biais d’une politique d’attribution dynamique durant les dernières années de démembrement ou par des clauses de préférence de rachat par CDC Habitat aux nus-propriétaires, afin de pérenniser le logement social.
Nous voulons aussi innover dans les modalités de production de logement social:par exemple développer la Vefa inversée [vente par un organisme HLM de logements non sociaux à un promoteur privé, dans le cadre d’une opération mixte comportant en majorité des logements sociaux, ndlr] via l’ULS sous maîtrise d’ouvrage de CDC Habitat, ou encore présenter des offres différentes en réinjectant des bénéfices dégagés par l’ULS au profit de projets plus écologiques, plus sociaux ou présentant davantage de mixité. Enfin, nous souhaitons accompagner les élus locaux sur leurs besoins concrets:logements étudiants, lutte contre l’habitat indigne, revitalisation du centre-ville, rattrapage des obligations SRU, transformation du bâti existant en logements sociaux… Nous entendons leur soumettre conjointement des engagements sur la durée pour leur permettre de développer leur politique de l’habitat.
A quelles problématiques vous heurtez-vous ?
Notre principale difficulté repose sur la recherche de produits. En Vefa, nous nous heurtons aux problématiques de production qui affectent actuellement le marché. Sur l’existant, nous sommes contraints par l’obligation de devoir acheter l’immeuble en bloc et la concurrence des nombreux acteurs qui se positionnent aujourd’hui sur la classe d’actifs résidentielle. Au-delà de ces difficultés, nous continuons d’aller prêcher la bonne parole auprès des pouvoirs publics. Notre expérience a permis de lever certaines réticences vis-à-vis des débouclages. Nous avons également rassuré en démontrant que nous n’avions pas vocation à nous substituer aux logements sociaux, mais plutôt à apporter une réponse supplémentaire sur les localisations prime, là où le foncier est très cher.
Face aux collectivités, nous rencontrons tous les cas de figure. Certaines demeurent réservées, soit qu’elles voient d’un oeil hostile le mariage de la sphère sociale et de la finance privée, soit qu’elles rechignent à implanter du social sur leur territoire. La loi SRU a de toute façon contraint les communes à créer des logements sociaux. Or l’ULS permet d’atteindre plus rapidement le quota exigé.
Malgré les difficultés de sourcing, vous accélérez les lancements ?
Nous avons commercialisé deux cents logements en septembre, et nous avons environ sept cents lots prévus dans les six mois à venir, soit trente à quarante opérations de tailles diverses, de dix à cinquante logements chacune. Un quart de l’offre sera de l’ultra-prime à Paris et en première couronne, en Vefa et dans l’existant; un autre quart concerne PACA; le reste sera implanté dans les grandes agglomérations françaises, ainsi que dans quelques communes littorales de l’arc Atlantique et de la Manche qui connaissent un réel engouement pour le démembrement. Il est aujourd’hui essentiel d’accroître la part d’ULS dans les opérations, mais également de développer l’ULI, voire l’ULL, afin d’atteindre rapidement mille cinq cents lots par an. A cet égard, nous souhaitons accentuer la part d’existant dans notre offre, afin qu’elle représente environ 20 % de la production dans les six prochains mois.