Créée il y a près de quatre ans par Ronan Le Moal et Charles Cabillic, Epopée Gestion propose une large offre de fonds centrés sur l’Arc Atlantique à une clientèle d’investisseurs institutionnels.
Convaincue que son approche territoriale séduit également les épargnants, la société compte diversifier sa base de clients, tout d’abord via un fonds éligible à l’apport-cession dédié à l’hôtellerie et le recrutement d’un directeur de la distribution. Explications avec Ronan Le Moal, cofondateur et directeur général d’Epopée Gestion qui a récemment opté pour le statut d’entreprise à mission.
Investissement Conseils : Alors que vous venez de lancer un premier fonds destiné à la clientèle privée, pourriez-vous nous présenter votre société, Epopée Gestion ?
Ronan Le Moal : Epopée Gestion est une société spécialisée dans le non-coté créée en 2020 par Charles Cabillic et moi. Notre raison d’être est d’accompagner la déconcentration de notre beau pays qu’est la France, tout d’abord en nous déployant sur la région que nous connaissons le mieux, l’Arc Atlantique, de la Normandie jusqu’à Toulouse. Nous estimons en effet que, dans notre métier, il convient de connaître son territoire avec intensité et d’entretenir une grande proximité avec ses actifs. Au fil de nos rencontres, nous avons construit différents véhicules d’investissement dans différents domaines. Tout d’abord, nous avons lancé les fonds Xplore qui accompagnent les acteurs du digital et de l’innovation. Les entrepreneurs de cet univers bénéficient en région d’un immobilier moins cher et de salaires moins élevés. En revanche, ces porteurs de projets sont un peu isolés et rencontrent des problèmes de financement et de réseautage:nous les accompagnons dans ce sens. Au total, nous gérons 85 millions d’euros sur cette stratégie.Nous nous sommes ensuite intéressés aux PME régionales via le fonds Epopée Transitions I (105 millions d’euros d’encours). Si les start-up parviennent à lever des montants importants, les PME régionales, qui sont le poumon économique de notre pays, rencontrent, elles aussi, des difficultés en termes d’accès au financement, mais également pour déployer une stratégie de croissance externe et réaliser leur transition digitale et écologique. Notre vocation est ici de créer des champions régionaux. Nous accompagnons aussi les entreprises à alléger leur bilan en rachetant leurs actifs immobiliers (bureaux, locaux d’activité) qui pèsent dans leur capacité d’investissement. Dans ce cadre, nous avons lancé l’OPPCI Epopée Immo Rendement I (270 millions d’euros d’encours).
Enfin, nous opérons également dans le domaine des infrastructures via le fonds Epopée Infra Climat I (120 millions d’euros). Il ne s’agit pas d’un fonds de pures infrastructures, mais il se concentre sur la décarbonation des infrastructures, principalement à travers deux axes : les infrastructures maritimes, et les énergies et les mobilités durables. Tous ces fonds sont accessibles à la clientèle institutionnelle, et nous venons par ailleurs de lancer un fonds spécifique pour la clientèle privée.
Notre équipe se constitue aujourd’hui de trente-cinq personnes réparties dans quatre bureaux : Brest, Nantes, Paris et Bordeaux. Nous avons en effet fait le choix de construire une plate-forme qui ne soit pas spécialisée dans un domaine, mais dont la vocation est de répondre à des problématiques spécifiques et territoriales. C’est pourquoi nous avons recruté au fur et à mesure des spécialistes réputés dans leur domaine. Par exemple, Arnaud Lehuédé, notre directeur associé de l’activité immobilière qui a opéré pendant plus de dix ans chez Axa IM Real Assets, nous a rejoints, comme Paul Caradec, ancien de Primonial REIM notamment, tous deux également épaulés par Laurence Martin qui dispose d’une solide expérience dans le secteur hôtelier, notamment au sein de l’équipe de transactions services hôtellerie de Mazars et chez JLL.
Après un peu plus de trois années d’existence, nous gérons 650 millions d’euros d’encours.
Sur le marché de la clientèle privée, vous lancez donc le fonds Epopée Hôtels I éligible au dispositif de l’apport-cession.
En effet, nous avons observé que sur notre zone d’activité – de la Normandie au Pays basque – il existe un déficit d’offres sur les hôtels des catégories trois et quatre-étoiles, alors que la demande s’accroît année après année. Le fonds va donc investir sur des actifs (murs et fonds) à reconfigurer et à rehausser en termes de qualité, avec une démarche Clé verte en compagnie de partenaires locaux, comme Etudes & Quantum.
L’objectif est de lever 200 millions d’euros au cours des dix-huit à vingt-quatre prochains mois, avec le soutien de quelques investisseurs institutionnels également. Nous visons à constituer un portefeuille de dix à quinze actifs, et à dégager un TRI autour de 10 % sur une durée maximale d’investissement de dix ans (huit ans, prorogeable deux fois un an), tout en ayant un profil assez défensif.
Pour accompagner le lancement de ce fonds, vous venez de recruter Maxime Le Boursicaud. D’autres fonds seront-ils créés pour la clientèle patrimoniale ?
Maxime nous a rejoints en qualité de directeur de la distribution afin d’élargir la commercialisation de notre offre auprès d’une clientèle privée via les multi-family-offices, banques privées et CGP. L’approche commerciale et marketing est différente entre les investisseurs institutionnels et les investisseurs privés. Ces derniers ont besoin de donner du sens à leurs investissements, et la thèse territoriale les séduit. Jusqu’ici, nous comptions déjà une cinquantaine de personnes physiques qui ont souscrit à nos solutions pour des tickets allant de 100 000 à 1 million d’euros.
Outre ce fonds, nous allons élargir notre offre destinée aux clients patrimoniaux sur des clubs deals immobiliers pour des minimums de souscription autour de 200 000 euros. Les opportunités sur cette classe d’actifs sont nombreuses actuellement:reprise de permis de construire, biens nécessitant des travaux… L’objectif sera de créer de la valeur en repositionnant des actifs d’hôtellerie, de bureaux, de logistique et, pourquoi pas, du résidentiel.
Notre fonds d’infrastructures pourrait également être référencé dans des contrats d’assurance-vie. Certes, ce n’est pas un fonds Evergreen, mais il a une durée de vie longue jusqu’à treize ans, et nous estimons que ce produit s’adapte bien à la clientèle de particuliers car il s’agit d’un fonds de rendement.
Les évolutions réglementaires sont-elles la raison de cette ouverture à la clientèle privée ?
Eltif 2 et la loi Industrie verte, entre autres, ouvrent une brèche, et c’est une bonne chose. Notre volonté d’élargir le cercle de nos investisseurs vers les particuliers n’est pas due à cette évolution, mais est née des échanges que nous avons eus avec eux et qui ont démontré leur appétence pour nos stratégies.
Nous sommes convaincus que l’idée de proximité n’est pas qu’une vue de l’esprit. Les particuliers eux aussi souhaitent faire vivre leur pays et investir dans leurs régions.
Vous avez également décidé d’opter pour le statut d’entreprise à mission en ce début d’année. Pour quelles raisons ?
Nous sommes devenus naturellement une entreprise à mission et ce changement de statut ne nous a demandé que peu d’efforts. En effet, tous nos fonds ont été classifiés article 8 ou 9 SFDR ; nos commissions de surperformance sont basées sur l’atteinte de critères extra-financiers; nous avons également mis en place un fonds de dotation ; nous mesurons l’impact de nos fonds en termes de création d’emploi, d’impact environnemental, de biodiversité ; une directrice de l’ESG, Zoé Ormières-Selves, a récemment été recrutée… Notre démarche se veut « ESGT » pour environnement, social, gouvernance et territoire car chez nous, l’impact territorial est le point de départ de tous nos investissements. Cette approche se veut pragmatique, très terre à terre, avec la volonté de générer des bénéfices pour toutes les parties prenantes.
En tant qu’entreprise à mission, nous avons listé une quinzaine d’objectifs opérationnels sur lesquels nous rendrons des comptes tous les six mois. Un comité de mission, composé de personnalités externes qualifiées et de Zoé Ormières-Selves pour le compte d’Epopée Gestion, a d’ores et déjà été constitué et s’est réuni pour la première fois il y a quelques semaines.