Ardian, un des leaders mondiaux de l’investissement privé, s’adresse à la clientèle privée via son équipe Private Wealth Solutions. Erwan Paugam, son responsable, nous expose sa vision du marché et présente les solutions actuellement distribuées via les cabinets de gestion de patrimoine.
Investissement Conseils : En 2020, Ardian créait le département Private Wealth Solutions. Pour quelles raisons ?
Erwan Paugam : Chez Ardian, nous nous sommes toujours adressés à une clientèle d’investisseurs particuliers. En effet, nous avons toujours servi des familles qui investissaient à nos côtés, ainsi que des entrepreneurs que nous avons financés et qui ont aussi investi dans nos fonds. Il y a près de cinq ans, nous avons décidé de structurer notre approche, avec une équipe de quinze personnes au niveau mondial dédiées à la clientèle privée. Aujourd’hui, nous disposons d’une plate-forme de solutions assez large dédiées aux investisseurs privés ; nous avons noué des partenariats avec des distributeurs aux Etats-Unis et en Europe, mais aussi en Asie et au Moyen-Orient. Le regard de la clientèle de particuliers sur les actifs privés a évolué ces dernières années pour différentes raisons. Tout d’abord, le non-coté n’est plus perçu comme une alternative : il fait désormais partie intégrante des portefeuilles. Les investisseurs se sont familiarisés avec la classe d’actifs et ont pu observer, à la fois, la qualité de ses performances à travers les cycles, sa résilience sur le long terme, mais aussi sa moindre volatilité. Il n’est donc plus nécessaire de les convaincre sur son utilité dans une allocation. Ensuite, l’accès a été simplifié par la digitalisation qui permet désormais de se concentrer sur les questions centrales de l’investissement. Cette digitalisation a également permis l’accès aux reportings et aussi, parfois, à l’automatisation des appels de fonds. Enfin, les modalités de fonctionnement des fonds sont aujourd’hui plus souples. L’investisseur dispose de nombreuses options pour investir : fonds fermés, fonds Evergreen, durée de blocage plus ou moins longue… Il existe plusieurs segments dans l’univers des actifs non cotés lesquels répondent à des besoins et des attentes différents. Et nous ne sommes encore qu’au début de l’aventure ! Le marché va continuer à se structurer et la palette de solutions va encore s’enrichir pour répondre au plus grand nombre d’investisseurs. Chez Ardian, nous restons nuancés vis-à-vis du terme de démocratisation du Private Equity. Nous préférons parler d’une meilleure ouverture de la distribution de cette classe d’actifs et une simplification de l’accès via l’innovation.
Que représentent les clients privés dans vos chiffres ?
Au niveau mondial, la clientèle de particuliers représente 14 milliards d’euros de nos encours en 2023, soit près de 10 %. Elle contribue pour une part de plus en plus importante à nos levées de fonds, plus de 20 % l’an passé, alors qu’Ardian réalise de belles années. En effet, 2024 devrait être une belle année, 2022 avait été notre meilleur millésime et 2023 notre deuxième plus bel exercice.
Quelles solutions proposez-vous à la clientèle française ?
Nous disposons de deux grandes catégories de produits. Il s’agit tout d’abord de notre fonds Evergreen, c’est-à-dire à capital ouvert, Ardian Access Solution, proposé comme sous-jacent d’unités de comptes référencé par plusieurs assureurs. Cette solution est donc accessible en assurance-vie française, actuellement auprès de deux partenaires, mais dont la distribution devrait s’élargir l’an prochain à un plus grand nombre d’assureurs. Sa liquidité est gérée par l’assureur, selon les conditions générales du contrat d’assurance-vie. Il s’agit d’un fonds de Private Equity qui investit aux côtés des fonds d’Ardian. Environ 30 % de son allocation est dédiée à des fonds de secondaire et le reste est investi en direct dans des entreprises aux côtés des différents fonds de la plate-forme d’Ardian. Il s’agit donc d’une solution de fond de portefeuille qui permet de s’exposer à un portefeuille déjà largement investi offrant une visibilité intéressante sur l’ensemble des lignes. L’actif se veut très diversifié tant sur le plan des sous-jacents que sur le plan géographique (principalement en Europe et aux Etats-Unis), des tailles des opérations ou des gérants puisque, dans le cadre du co-investissement et du secondaire, nous investissons aux côtés de nos pairs. Parallèlement, via des comptes-titres, nous proposons un accès plus pur à nos stratégies par l’intermédiaire de partenaires bancaires, mais aussi avec des acteurs tels que Private Corner, IQEQ, Peqan ou encore 123 IM. Il s’agit généralement de feeders, mais cela peut également être des fonds de fonds. Ici, il s’agit de solutions plus « classiques », avec des appels de fonds progressifs et accessibles à partir de 100 000 euros. A partir de l’année prochaine, nous comptons proposer des fonds « annuels » avec une durée d’engagement plus courte et un seul appel de fonds. Ces fonds seront dédiés à du co-investissement avec une bonne diversification géographique, de taille d’entreprises et de gérants.
Quels types de fonds privilégient vos partenaires français actuellement ?
La tendance actuelle s’oriente principalement vers les fonds de secondaire, ainsi que ceux de co-investissement.
Et sur la dette privée et les infrastructures ?
Sur les infrastructures, la demande s’est largement renforcée en France. Nous avons également rencontré de beaux succès à l’international, notamment aux Etats-Unis. Cette typologie d’actif se prêterait assez bien à la création d’un fonds Evergreen. Il s’agit en effet d’une alternative intéressante au sein des actifs réels avec des distributions régulières, une forte proximité avec l’investisseur, répondant aux tendances actuelles de décarbonation et de digitalisation de l’économie. La dette privée a, de son côté, connu un fort succès durant la période de hausse des taux, une tendance qui s’est aujourd’hui normalisée. Enfin, avec les taux qui se stabilisent, nous croyons beaucoup à l’immobilier, et nous recevons une bonne écoute de la part de nos clients sur ce sujet.
Quelles sont vos ambitions sur le marché français des CGP ?
Notre volonté est de pouvoir proposer des solutions permettant aux différentes typologies de CGP de se positionner sur la classe d’actifs. Nous comptons augmenter notre visibilité aussi bien via nos partenariats, mais également en développant une approche plus proactive auprès de nos distributeurs. Nous apprécions travailler avec nos partenaires pour nous positionner dans une réflexion globale d’allocation et leur proposer la brique d’Ardian qui répondra aux attentes de leurs clients. C’est la meilleure façon pour nous de nous assurer que nos solutions seront proposées aux bons clients. Ainsi, si la clientèle privée joue pour une partie non négligeable de nos levées, nous souhaitons la renforcer à la fois par la diversification de nos produits et par l’augmentation de nos moyens. Sur les actifs privés, le marché des CGP français est, au niveau mondial, le plus développé avec celui des Etats-Unis. Il est très sophistiqué, innovant et à l’écoute. Il faut s’en féliciter ! Nous croyons en ce secteur comme le prouve notre prise de participation au sein de la Financière d’Orion. Les CGP ont su tisser des liens forts avec leurs clients. D’ailleurs, la culture financière des épargnants n’est pas aussi mauvaise qu’on veut le dire. Les investisseurs ont bien compris la logique du capital-investissement et sa valeur ajoutée. Ce marché existe en France depuis plus de trente ans et est aujourd’hui mature. Beaucoup ont d’ailleurs créé leur patrimoine grâce à lui. Et cela suscite de la demande.