Sur un marché des CGP-courtiers très concurrentiel, l’entité MMA Expertise Patrimoine se distingue par un discours vigilant et singulier. Rencontre avec son nouveau responsable, Denis Carletti.
Investissement Conseils : Vous avez pris les rênes de MMA Expertise Patrimoine au 1er janvier. Comment définir cette entité ?
Denis Carletti : MMA Expertise Patrimoine, c’est avant tout l’appartenance au groupe mutualiste Covéa, l’un des leaders français de l’assurance composé de quatre marques fortes que sont les MMA, la Maaf, la GMF, toutes trois à forte notoriété, et du réassureur Partner Re. Il faut avoir quelques chiffres en tête : Covéa, c’est 11,6 millions de sociétaires au niveau national, 19,1 milliards de primes encaissées, 17,2 milliards de fonds propres. Le ratio de solvabilité est de 351 %, un des plus élevés du marché. C’est dans cet espace que s’inscrit MMA Expertise Patrimoine, qui se définit comme la porte d’entrée du groupe pour les CGP-courtiers, et ce, depuis plus de vingt ans. Cette entité dont j’ai pris la responsabilité au 1er janvier, je la connais très bien pour en avoir occupé plusieurs responsabilités, dont dernièrement la charge du secteur Grand Ouest. La structure se divise en trois zones au niveau national, elle comprend aussi un pôle dédié aux grands comptes et banques privées, et un pôle pour les relations avec les partenaires. Sur le plan humain, nous comptons vingt-deux inspecteurs en région, qui sont présents dans toutes les grandes villes de France, mais aussi treize chargés de relations partenaires qui ont un rôle de middle-office et commercial. Un back-office dédié, l’appui d’un pôle ingénierie patrimoniale viennent compléter l’organisation auprès de nos mille trois cents partenaires actifs.
Qu’est-ce qui vous distingue sur le marché des CGP-courtiers ?
Sans hésiter, notre ADN mutualiste. Nous évoluons dans un monde très capitalistique composé de gros groupes d’assurances. Au milieu, nous sommes une entité mutualiste qui se différencie par une approche plus prudente de l’épargne. L’épargnant va voir le CGP pour son conseil, les innovations produits mais aussi, ne l’oublions pas, pour la sécurité de son patrimoine. C’est pourquoi MMA Expertise Patrimoine ne répond pas, par prudence, à toutes les solutions commerciales du marché. Cette gestion mutualiste fait notre légitimité, et nous la revendiquons haut et fort. Pour le CGP, choisir MMA Expertise Patrimoine, c’est aussi s’appuyer sur un groupe à la solidité financière avé- rée, qui a permis l’investissement dans le réassureur Partner Re à partir de ressources propres. Cette solidité du groupe et ce discernement dans l’approche des marchés plaisent aux CGP, elle est complémentaire aux offres des assureurs traditionnels. Nous sommes d’ailleurs sollicités pour des partenariats avec les groupements de CGP les plus importants.
Faisons un point sur votre offre. Quelles sont vos forces ?
D’abord, notre gamme de solutions produits Signature qui est complète, avec de l’assurance vie, de la capitalisation, de l’épargne-retraite, et de la prévoyance (assurance-décès et emprunteur). Nous travaillons en architecture ouverte dans tous nos produits. C’est un point qui nous différencie des contrats des marques du groupe Covéa, qui fonctionnent essentiellement avec des fonds maison. Chez nous, le CGP va tout trouver, sauf certains actifs que nous ne référençons pas, j’y reviendrai. Point clé, nous bénéficions du support en euros du groupe, qui est puissant et dispose d’une forte PPB (provision pour participation aux bénéfices), supérieure à 5 %. C’est un atout durable dans notre offre, que nous mettons en avant et qui va prendre toute son importance dans les temps à venir.
Nous n’avons jamais fermé la collecte sur le fonds en euros, jamais imposé une obligation d’investir sur les unités de compte (UC) pour y accéder. Un bonus de rendement est toutefois octroyé aux assurés selon leur part d’UC, portant le taux jusqu’à 2,15 % en 2022. L’important est de pouvoir sortir des taux compétitifs et de pouvoir continuer à le faire, ce qui est notre cas. Les réserves élevées du groupe vont nous permettre de faire le lien entre la remontée des taux obligataires et le rattrapage de la performance du fonds en euros. Le conseiller en gestion de patrimoine fait 40 à 50 % de fonds en euros dans sa collecte, c’est donc un point très important pour lui.
Pour le reste, notre offre financière est volontairement contenue, il est inutile de référencer des centaines de fonds. Nous en comptons environ deux cents dans nos contrats, finement choisis. Trois fois par an, en janvier, mai et septembre, nous référençons de nouvelles UC et de nouveaux supports à formule exclusifs, qui auront été bâtis à partir de notre cahier des charges. Depuis début janvier, notre proposition porte sur un support à formule plus sécuritaire, avec des barrières de rappels très basses. Le référencement des fonds chez MMA se fait avec exigence. Nous partons d’une question : de quoi ont besoin les CGP ? Les inspecteurs font remonter les demandes, nous réunissons un comité de sélection, puis le pôle marchés financiers fait son analyse à partir de différents critères qui nous paraissent essentiels.
Votre entité est présente sur le marché spécifique des majeurs sous tutelle. Pourquoi ?
Parce que nous avons un savoir-faire dans ce domaine. Et parce que c’est dans notre ADN mutualiste de nous intéresser aux personnes vulnérables. Nous avons bâti un partenariat de mécénat solide avec l’association France Tutelle, qui accompagne les aidants-tuteurs familiaux. Ce partenariat a été récompensé par deux prix de la Philanthropie. Nous avons une solution multisupport spécifique, avec Signature Tutelle, ainsi qu’un contrat de capitalisation, l’assurance-vie n’étant pas toujours adaptée aux situations rencontrées dans la gestion sociale et patrimoniale des personnes protégées.
Sur le marché du PERin, quelle est votre place ?
C’est une place légitime. Le PER, c’est du long terme, avec en moyenne vingt ans de cotisations et vingt ans pour profiter du capital constitué. Soit un partenariat de quarante ans. Il faut trouver une entreprise capable de tenir la distance, c’est le cas de Covéa avec sa gestion de bon père de famille, son antériorité, sa solidité financière. Le CGP est en confiance avec nous, il ne cherche pas la même chose que sur un placement financier. Au niveau produit, notre PER, Signature PER, a été récompensé plusieurs fois par différents prix. Nous lui avons dédié une task-force de dix personnes en appui des CGP pour gérer les transferts entrants. Le marché de la retraite est en effet un gros marché de transferts venant des Perp et autres produits retraite anciens. Le début fut compliqué, il fallait parfois six mois à un an pour réaliser un transfert. Aujourd’hui, grâce à notre équipe dédiée, les dossiers sont réalisés entre deux et trois mois.
Parlons de la qualité de services que vous apportez aux CGP. Qu’en dire ?
Nous sommes dans une phase de digitalisation, qui a commencé en 2022. En partenariat avec Manymore, nous avons choisi de digitaliser 100 % de nos contrats en stock, y compris les anciens contrats. C’est un projet très ambitieux, un tour de force qui devrait aboutir début 2024. Arbitrages, versements ultérieurs, Web client, messagerie sécurisée sont déjà déployés. Les souscriptions affaires nouvelles seront prochainement disponibles. Mais chez MMA Expertise Patrimoine, le digital se fait sans oublier l’humain. C’est pourquoi je préfère parler de « phygital ».
Les équipes en régions sont essentielles et nous voulons que le CGP ait toujours quelqu’un en proximité à qui s’adresser, pour toutes ses questions commerciales, techniques et gestion. Le CGP est très demandeur et exigeant : notre outil se doit d’être moderne, à la hauteur de leurs attentes. C’est toujours une de nos priorités pour 2023.
Quel regard portez-vous sur le marché de l’assurance-vie et le rôle qu’y tiennent les CGP ?
Les scores de l’assurance-vie parlent mieux que moi. Les collectes sont toujours bonnes, le couteau suisse de l’épargne fonctionne à plein et a encore de belles années devant lui.
Le CGP y tient une place très importante. Il travaille avec trois à cinq compagnies en général, c’est une belle palette. La réglementation évolue sans cesse et, entre autres pour les questions de rémunération liées aux frais, ils peuvent encore gagner du terrain en assurance-vie et être ambitieux, il faut l’être, mais avec discernement et prudence. Les CGP doivent aujourd’hui faire attention à la place du fonds en euros. Il ne s’agit pas de pousser le client à y revenir, mais il y a un vrai sujet à ne surtout pas écarter. Chez nous, il pèse 51 % de la collecte. Son rendement doit résolument rester attractif dans la durée, ce qui est le cas chez Covéa. Les CGP doivent rester vigilants sur certains actifs, notamment sur la pierre-papier. Nous limitons notre offre à un OPCI, et prochainement nous intégrerons une SCI. Mais nous ne proposons pas de SCPI, car outre des frais excessifs, le risque de liquidité en cas de retournement du marché serait dangereux pour l’assureur et donc les assurés. C’est la force du mutualiste de savoir dire non !
Quels défis vous faut-il relever sur ce marché de l’épargne très concurrentiel ?
Notre défi immédiat, c’est de savoir gérer la hausse des taux obligataires. C’est donc se placer du côté de l’assureur. Il faut saisir cette opportunité pour remettre le support en euros à la bonne hauteur. Ce positionnement est fondamental et notre ADN mutualiste y répond. L’autre défi est de proposer aux CGP et courtiers un outil de gestion/services moderne, une offre sans cesse revisitée et un lien solide de proximité avec les partenaires. Nous ne limiterons pas le nombre d’inspecteurs sur le terrain, contrairement à d’autres. Nous gardons notre organisation, les liens humains étant pour nous essentiels. Les CGP savent nous challenger et nous faire remonter leurs idées, les reflets du marché et leurs attentes. Il faut être agile, réactif, ce qui n’est pas toujours simple dans un grand groupe comme le nôtre. C’est mon travail de tous les jours que de donner ce cap aux équipes de MMA Expertise Patrimoine.