Une gestion diversifiée sur de l'intelligence artificielle

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> Article paru dans le magazine n°: 834

La société de gestion lyonnaise Vivienne Investissement se distingue par les performances de son fonds phare, Ouessant qui a traversé sans heurt la crise de la Covid-19. Son fondateur et président, Laurent Jaffrès, commente les particularités de son process de gestion innovant et les fondements de sa démarche.

Investissement Conseils : Pourquoi avez-vous décidé de créer Vivienne Investissement, une société au style de gestion quantitatif ?

Laurent Jaffrès : A l’origine de la création de Vivienne, j’ai fait le constat que la gestion d’actifs reposait sur un cadre théorique qui ne permettait pas de bien appréhender les événements extrêmes. En effet, les lois des marchés sont complexes et les intuitions souvent trompeuses. De ces constats, et au regard de ma formation et de mon parcours de scientifique, j’ai eu l’ambition d’aborder la gestion différemment, sans pour autant m’opposer à la gestion « classique ». L’objectif a donc été d’innover dans la construction de portefeuille et d’appréhender les risques en amont des décisions de gestion et de les mettre au coeur du process d’investissement.

Constituée en 2005, notre équipe de scientifiques issus des univers des mathématiques et de la physique a ainsi repensé les fondamentaux de la théorie de portefeuille (diversification et contrôle des risques) avec des hypothèses plus réalistes. Et pour cause, les marchés n’obéissent pas à des lois simples et celles-ci évoluent avec le temps – les variables explicatives des évolutions de marché changent continuellement et sont très nombreuses.

Avec l’appui de nos actionnaires historiques, nous avons investi de l’ordre de 6 millions d’euros dans la recherche jusqu’en 2012, date à laquelle nous avons obtenu notre agrément AMF et lancé notre premier fonds Ouessant. Depuis l’origine, l’ensemble de nos process est géré de manière systématique : front, back, middle-office, liens avec notre dépositaire, procédures, lecture des mails, des news de marché… Ces process sont basés sur notre outil d’intelligence artificielle, Virginie, à laquelle nous avons donné un visage humain. Elle nous permet de réduire notre risque opérationnel, tandis que l’équipe de gestion et de recherche reste concentrée sur son métier : la bonne gestion de l’argent de nos clients.

Concrètement comment fonctionne votre système de gestion ?

L. J. Le recours à un process scientifique et discipliné nous permet d’éviter les biais humains et de capter davantage d’informations. L’objectif est d’être le plus diversifié et flexible possible pour générer de la performance sur le long terme et s’adapter à toutes les conditions de marché. Nos algorithmes analysent tout un ensemble de données et nous indiquent s’il convient de sur ou sous-pondérer certaines classes d’actifs, voire de couper totalement une exposition. L’univers d’investissement se concentre sur trois classes d’actifs : les actions, les obligations souveraines et la volatilité, sur toutes les zones géographiques et par le biais des instruments les plus liquides.

Notre approche ne repose que sur des données de prix, traitées en continu (actions, taux, indices, CDS souverains et privés, etc.) qui sont analysées en temps réel. En effet, seuls les prix des actifs synthétisent le sentiment de tous les acteurs de marché. Car finalement, le marché a toujours raison… A l’image de la sismologie, nous disposons donc de capteurs sur l’ensemble des marchés pour observer les secousses, mesurer leur intensité et analyser les risques de propagation qui peuvent déboucher sur un krach, comme cela a été le cas en 2008, en 2011 et, plus récemment, au premier trimestre de cette année. Cette approche novatrice a permis à nos fonds de faire face à la tempête qui a secoué les marchés en début d’année et d’être parmi les seuls à se maintenir en territoire positif en plein coeur de la crise.

Quelles solutions proposez-vous ?

L. J. Nous disposons aujourd’hui d’une gamme cohérente de fonds flexibles diversifiés, échelonnée selon le niveau de risque pour répondre aux différents besoins des investisseurs. Notre fonds phare, Ouessant, est un OPCVM flexible diversifié (Ucits) de profil équilibré (SRRI 4). Son objectif est clair : il cherche à offrir une performance la plus régulière possible au cours du temps, tout en cherchant à maîtriser le risque, avec un objectif de volatilité annualisée de l’ordre de 8 %.

Pour les profils plus dynamiques, nous proposons le FPS Mach 3 (SRRI 6), lancé il y a cinq ans. Son objectif est également de délivrer une performance la plus régulière possible au cours du temps, tout en cherchant à maîtriser le risque, avec un objectif de volatilité annualisée de l’ordre de 20 %.

Sur le fonds Ouessant, comment avez-vous traversé la crise de la Covid-19 ?

L. J. Très sereinement. Ouessant a particulièrement bien performé face au choc boursier, se plaçant parmi les rares fonds à avoir maintenu un rendement positif tout au long de la crise. Notre allocation d’actifs par intelligence artificielle a fortement diminué l’exposition aux actions dès le 24 février pour afficher une sensibilité presque nulle aux actions jusqu’à la fin du mois de mars. Nous sommes aussi passés long sur la volatilité le 24 février. L’exposition obligataire souveraine, dans un premier temps maintenue en vitesse de croisière, a été réduite fortement dès le 12 mars. Entraînée pour s’adapter aux environnements de marché inédits et brutaux, la stratégie a pu être très réactive et protectrice dans un contexte de stress très élevé sur les marchés. Par la suite, à la faveur d’une diminution modérée et progressive des risques, notre stratégie a graduellement relevé son exposition actions et sa sensibilité taux. En mai, nos indicateurs indiquant un retour au calme sur les marchés actions, l’allocation d’actifs par intelligence artificielle d’Ouessant a fortement augmenté son exposition au risque actions, permettant au fonds de tirer parti de la hausse des marchés. En définitive, le premier semestre 2020 a été un vrai cas d’école pour notre stratégie qui a été entraînée pour réagir à ce type de changement brutal et inédit, et démontre ainsi sa pertinence.

Notre approche scientifique a une nouvelle fois fait ses preuves et a permis de protéger le capital de nos clients, un point fondamental lorsque les marchés sont chaotiques.

Ce sont finalement les phases de baisse et non de hausse des marchés qui permettent de juger de la qualité d’une bonne gestion. En effet, n’oublions pas qu’un investissement qui subit une baisse de 50 %, doit prendre une hausse de + 100 % pour revenir à son point de départ ! Maîtriser les chutes extrêmes est donc crucial.

A combien s’élèvent vos encours sous gestion ?

L. J. Ils atteignent aujourd’hui près de 260 millions d’euros. Nous connaissons une croissance continue de nos encours. Notre clientèle se compose à 50 % d’investisseurs institutionnels, 30 % de banques privées et family offices, et 20 % de cabinets de gestion de patrimoine. Nous recevons des demandes de partout dans le monde : ce type de gestion très différenciant est aujourd’hui très apprécié.

Des performances solides

Au 15 juillet, le fonds Ucits Ouessant (part A – SRRI 4) réalisait une performance de + 3,47 % depuis le début de l’année. Sur plus long terme (toujours au 15 juillet), le fonds délivre une performance de 26,89 % sur cinq ans, avec un ratio de Sharpe cinq ans de 0,75 (au 30 juin). Quant au FPS Mach 3 (SRRI 6), les performances sont les suivantes : + 12,30 % YtD et + 117,87 % sur cinq ans, avec un ratio de Sharpe cinq ans de 0,81 (au 30 juin), pour la part A. 

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